Crédit : CHUM

L’intégration des arts et de la culture au CHUM
Mathieu St-Gelais, délégué culturel au CHUM – Décembre 2011
Sous l’impulsion de son directeur, Christian Paire, le CHUM, s’est doté en 2010 d’une politique d’intégration des arts dans sa mission de soins.
La volonté d’intégrer les arts et la culture au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) est née de la vision de son directeur général, Christian Paire. Ce dernier fut impliqué de près, en France, dans le développement de cette idée qui a concrètement mené le ministère en charge de la santé et le ministère de la Culture et des Communication à tisser des liens à cette fin depuis environ une dizaine d’années.
D’ailleurs, il est intéressant de souligner que la Loi française rend désormais obligatoire le fait pour les hôpitaux de se doter d’une politique culturelle.
Les premiers balbutiements du projet culturel du CHUM prirent forme, à l’automne 2010, avec la venue du danseur-chorégraphe français Sylvain Groud. Fort de son expérience d’artiste en résidence au CHU de Rouen, il a su émouvoir patients et employés en livrant ses performances avec sensibilité, dans les unités de soins. Ce projet aura également été l’occasion d’accueillir une demi-douzaine de danseurs québécois pour un stage d’une semaine au CHUM et aura permis d’établir quelques premiers contacts avec des organismes culturels montréalais. Par la suite, au début de 2011, la création d’un poste de délégué culturel est venue concrétiser la volonté du CHUM de passer à l’action…
Défis et crédibilité
Intégrer l’art aux milieux de la santé présente des défis particuliers. En effet, l’art est perçu par certains comme un luxe, et l’œil extérieur, pragmatique, aura tôt fait de critiquer la décision d’allouer des ressources à de telles dépenses quand les services eux-mêmes sont parfois menacés par les restrictions budgétaires. Il est donc naturel et nécessaire que des efforts soient consentis afin de susciter l’adhésion au projet et d’en démontrer le bien fondé.
En ce sens, la crédibilité d’un tel projet repose sur deux éléments fondamentaux: d’une part, une démonstration concrète de l’impact réel de l’art sur le milieu, sur la vie des patients et ce, par la réalisation de projets convaincants et de qualité. D’autre part, il importe d’en assurer le financement sans y affecter des sommes qui seraient autrement consacrées aux soins et services. Dans la première année d’existence du projet, c’est ce à quoi nous avons déployé nos efforts.
L’élaboration d’un programme de qualité autofinancé
Afin d’asseoir progressivement la crédibilité du projet, plusieurs démarches ont été effectuées. Tout d’abord, l’établissement d’alliances avec des organismes reconnus tels la Société pour les arts en milieux de santé (spécialisée dans l’organisation de concerts professionnels) et la Fondation de l’art pour la guérison (vouée à l’installation d’œuvres d’art dans des établissements de santé) nous assure des choix artistiques éclairés et de grande qualité. D’autres partenariats ont permis d’enrichir les projets, notamment celui que le CHUM a établi avec la Faculté des arts de l’UQAM, dont la proximité physique et la réputation incontestable en font un allié de choix. Enfin, la création d’un «groupe de travail – arts et culture», formé d’acteurs du CHUM provenant de secteurs variés et de représentants d’organismes culturels, assure la validation des projets et permet de les enrichir, tout en favorisant une appropriation de cette vision par la communauté du CHUM et celle du secteur culturel montréalais.
Des projets de qualité ne peuvent évidemment se concevoir sans un financement adéquat. Le recours au mécénat et l’implication du milieu des affaires apparaît comme une avenue nécessaire, tout comme la participation des secteurs publics de la culture. Comme ailleurs dans le milieu artistique, le financement est un défi de taille, qui requiert créativité et persévérance. Nous devons débroussailler de nouvelles voies, et convaincre nos futurs partenaires de tout le potentiel du projet.
Vers un hôpital plus hospitalier
La meilleure façon de convaincre les sceptiques du bien-fondé d’une telle démarche consiste à mettre en lumière les réactions et l’émotion que suscitent les projets. Tel ce patient traité par dialyse qui, au son de la harpe, confie à son infirmière qu’il se sent «flotter sur un nuage» et en oublie momentanément ses douleurs. Ou ce visiteur qui, en se rendant au chevet d’un proche, découvre au détour d’un corridor une exposition de lithographies de Jean-Paul Lemieux devant laquelle il s’attarde quelques instants, apaisé. Quand l’art s’invite à l’hôpital, il dédramatise les lieux. En s’adressant à la sensibilité des patients, employés et visiteurs, il leur offre un milieu de soin plus hospitalier et humain.
Une vision pour l’avenir
L’établissement de la politique d’intégration des arts et de la culture du CHUM s’ancre avant tout dans le quotidien de l’établissement: concert dans les unités de soins, installation d’œuvres sur les murs, exposition de photos à l’occasion du 15e anniversaire du CHUM, élaboration prochaine d’une résidence de création d’artiste… Cette volonté s’incarne donc par une série de gestes orientés d’abord vers le patient et ses proches, sans négliger la vaste communauté de travailleurs et de professionnels qui les entourent.
Notre démarche voit cependant plus loin, en ce qu’elle vise également à ouvrir l’hôpital sur la cité en présentant l’établissement comme un acteur participant à la vie culturelle de son milieu. De plus, elle promeut la mise en valeur de l’histoire, du patrimoine culturel et architectural et des grandes réalisations des hôpitaux fondateurs du CHUM.
Enfin, la politique culturelle du CHUM se déploie dans l’avenir. Face au projet d’envergure que représente la construction d’un nouvel hôpital universitaire à la fine pointe des technologies et de la recherche, il importe de ne pas oublier l’humain. L’art, cet élévateur de l’âme, sera là pour nous accompagner et nous aider à pousser un peu plus loin notre mission de soignants.