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Médiation culturelle

Quels défis pour la médiation culturelle aujourd’hui? Publié le : 15 janvier 2014

Marc Pronovost – Janvier 2014

En décembre 2013, des acteurs du milieu culturel de différentes régions du Québec et leurs partenaires se sont réunis à la Cinémathèque québécoise pour discuter des enjeux entourant la collaboration en médiation culturelle.


Culture pour tous organisait en décembre dernier deux journées professionnelles intitulées : Les défis de la médiation culturelle. Ce champ d’action et d’expertise que constitue la médiation culturelle en est aujourd’hui à une nouvelle étape de sa croissance. Le public, les bailleurs de fonds ainsi que les politiques culturelles et sociales y sont de plus en plus sensibles. Les praticiens commencent à se regrouper sur le terrain et il émerge tranquillement un besoin de mise en réseau plus concret des connaissances et des compétences. Des pôles régionaux s’organisent dans différentes régions du Québec, ce qui contribue d’autant plus à l’augmentation et à la diversification des partenariats. Face à ces constats, des membres du Groupe de recherche sur la médiation culturelle (GRMC) et Culture pour tous ont souhaité aborder la question de la gestion des enjeux de la collaboration et des partenariats en médiation culturelle.

Ces journées professionnelles étaient orientées autour de trois initiatives analysées sous l’angle de l’inclusion et de la diversité, tel que le définit l’un des axes de recherche du GRMC. Les projets présentés comportaient tous une forte implication sociale autour d’actions de cocréation collective et de développement/changement social. À travers la découverte de ces trois initiatives menées dans autant de régions du Québec, les représentants d’organismes, les panélistes et le public ont pu échanger sur leurs différentes réalités.


je_suisLe premier projet exposé au public en était un d’ordre municipal, « Je suis… », présenté par son promoteur, Michel Vallée, directeur du Service des arts et de la culture de la Ville de Vaudreuil-Dorion. Il y a de cela quelques années, cette municipalité de la proche banlieue de Montréal commençait à accueillir de plus en plus de membres de communautés culturelles, dont plusieurs immigrants de seconde génération. L’intégration de cette nouvelle population ne se faisant pas si facilement, M. Vallée sentait le tissu social s’éroder. Les citoyens entretenaient une incompréhension les uns envers les autres, ce qui minait la qualité du sentiment communautaire. L’initiative « Je suis… » a donc été créée afin d’offrir aux citoyens des plateformes concrètes, ludiques et créatives visant à stimuler des rencontres. Avec le temps, la toile de 400 à 600 ateliers annuels et d’événements à grand déploiement – tels des parades, des concerts, des expositions en plein air – a su rassembler les habitants de Vaudreuil-Dorion autour d’une fierté reconstruite et d’un projet de société plus vaste. Les partenariats de la Ville dans le cadre de ce projet regroupent des entreprises, des agences gouvernementales, des organismes communautaires et plusieurs artistes. « Je suis… » s’inscrit maintenant dans la politique culturelle de la municipalité, qui accorde une grande importance à la médiation culturelle. Arrivant à la fin d’un premier cycle d’activités de trois ans, la Ville se retrouve désormais devant de nouveaux défis. Tout en maintenant ses activités de médiation, elle souhaite aussi investir dans des modes de diffusion classique de la culture, ce que pourrait lui permettre une entente récente avec le ministère de la Culture et des Communications du Québec (MCCQ).


ÉNAMLe deuxième organisme présenté, l’École nationale de l’apprentissage par la marionnette (ÉNAM), utilise le théâtre de marionnettes afin d’intervenir auprès d’individus vivant avec des problématiques de santé mentale. Située dans la ville de Saguenay, l’École a noué divers partenariats qui lui permettent de financer ses activités en plus de bénéficier du travail de professeurs qualifiés pour l’enseignement aux adultes. Elle a notamment le soutien de la commission scolaire de la région, de l’Agence de la santé et des services sociaux, du MCCQ et d’Emploi-Québec. Le cofondateur, directeur général et artistique de l’ÉNAM, Richard Bouchard, était notamment accompagné de Marcelle Dubé et Ève Lamoureux, membres du Groupe de recherche sur la médiation culturelle et chercheures ayant procédé à l’évaluation des activités de l’école pour le compte d’Emploi-Québec. Elles ont mis en lumière l’attention accrue que l’organisme devra porter à l’établissement de son leadership et à l’élaboration d’une identité forte afin d’attirer de nouveaux partenaires.


colloque_execoExeko, le troisième organisme présenté, a comme mission de favoriser, par l’innovation en culture et en éducation, l’inclusion et le développement des populations les plus marginalisées. Les partenariats sont au centre de la culture managériale et d’intervention de l’organisme, qui travaille auprès de gens en situation d’itinérance, vivant avec une déficience intellectuelle, en milieu carcéral, ou encore membres des Premières Nations vivant dans et hors des réserves, etc. Leurs partenariats sont multisectoriels, donc relativement complexes. Dans un esprit de collaboration totale, les codirecteurs Nadia Duguay et François-Xavier Michaux arrivent à offrir avec leur équipe une panoplie d’activités complémentaires aux services déjà offerts par leurs partenaires. Pour donner un aperçu de leur travail et de leur approche, les deux codirecteurs ont présenté l’exemple d’une grille où sont identifiés des besoins et les partenariats potentiels visant à les combler, qu’ils soient d’ordre financier, matériel ou professionnel, sous forme d’accompagnement, de soutien ou d’expertise, etc. Autant sur le terrain que dans son mode de gestion, l’organisme applique les mêmes préceptes d’intervention, de neutralité, d’ouverture et de transparence – ce qui, selon les codirecteurs et certains de leurs partenaires présents lors du panel, est reconnu et apprécié par leur réseau.


À l’issue de ces présentations, le public et les panélistes ont pu partager leurs visions et leurs expériences de collaboration. Plusieurs grands défis et quelques questions ont émané de ces échanges. Certains touchaient la gestion des attentes des partenaires – la reddition de comptes, notamment –, mais un grand thème ressortait davantage que les autres : la concertation. Ce thème aura teinté toutes les conversations, que ce soit au sujet de la refonte des relations entre les partenaires, de l’ouverture à une discussion d’égal à égal ou de l’importance des échanges francs afin d’aborder en équipe partenariale les problèmes et les défis sur le chemin de la réussite.

colloqueLes études de cas présentées lors de ces deux journées ont servi de canevas pour entrevoir le futur des pratiques de médiation culturelle. Plusieurs personnes dans la salle ont posé des questions très concrètes sur l’aspect opérationnel des projets, tandis que d’autres souhaitaient aborder des concepts plus théoriques de l’intervention en médiation culturelle. La question de la formation universitaire des médiateurs culturels est apparue en fin de parcours de pair avec les questions liées à l’interrelation de l’art et du travail social dans certains projets. Les questions d’éthique étaient au centre de cette discussion. Ces sujets ne peuvent être pris à la légère, selon Danièle Racine, agente de développement culturel à la Division action culturelle et partenariats de la Ville de Montréal, et membre du GRMC, puisqu’une telle formation exige que l’on définisse la médiation culturelle alors que sa pratique évolue constamment. Cette définition pourrait ancrer le champ de pratique dans un espace trop circonscrit, mais elle pourrait par contre aussi contribuer à la reconnaissance du travail des médiateurs culturels à travers le territoire. C’est donc l’une des questions lancées qui met la table pour la suite des discussions.

Ces journées professionnelles sont toujours le théâtre de rencontres improbables, cette fois-ci entre des intervenants de partout au Québec et de la proche francophonie canadienne. Il y a fort à parier que les discussions se poursuivent déjà à travers le territoire et que les prochaines journées professionnelles seront un terreau fertile pour la mise en commun des nouvelles idées qui émergeront au cours des prochains mois.

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